QU'OSONS-NOUS...
Qu’osons-nous, de nos jours, appeler « poésie » ?
MUSIQUE SANS SOLFÈGE orpheline de charme
Pâle agrégat de mots, de sens toujours absent
Dont l’auteur satisfait non jamais ne s’alarme
Mais qui, pour l’auditeur, est toujours agaçant !
UN SOLFÈGE SANS NOTE est-ce bien concevable ?
Ni noire, ni pointée et sans partition ,
Ignorance totale, excuse irrecevable,
Comment d’un tel chaos créer l’émotion ?
PEINTURE SANS DESSIN, horrible barbouillage
Là ce pinceau qui court mais il ne sait pas où !
Pour notre imaginaire, impossible voyage,
Concentré d’indigence et de manque de goût.
UN DESSIN SANS IMAGE, un rébus, un fatras
Devant, l’amateur d’Art semble rester perplexe…
Ternes productions, nuages scélérats
Laisseront les sourcils en accent circonflexe !
UNE IMAGE SANS FOND qui va nous offenser :
Nous n’y trouverons rien, mais prônant l’hermétisme.
Vide, l’exécutant « doit apprendre à penser »
Car le mépris de l’autre atteint son paroxysme !
La poésie n’est plus, lors, comment s’insurger ?
Nous récoltons les fruits de ces temps d’ignorance
Où tant de scribouillards ne nous font plus rêver :
Chacun se croit poète au beau pays de France !
Le néant virtuel a tué tous les Arts
L’immédiateté remplace l’esthétisme
Utilisant les mots par les plus grands hasards
Le vers devenu prose souffre de barbarisme.
Que dira-t-on de nous dans les siècles futurs :
« Aucune poésie en ces temps de paresse »
Car on aura écrit des versets bien obscurs
Appelés « libérés » mais pleins de sécheresse.
Et nous disparaîtrons comme d’autres avant nous
Nous ne laisserons pas la marque d’une époque ;
De ce laisser-aller comment donc être absous ?
Le poème n’est plus qu’une triste défroque !
Mireille TURELLO-VILBONNET