SEPTEMBRE 2014: LE VIN
Affrontons
Affrontons le pari des saisons endormies
Quand le bois se prépare en sarments de patience
Quand le sol se durcit sous les nuits d’anémies
Quand le ciel s’éternise en blancheurs d’expérience
Affrontons le présent des noëls automnaux
Quand le vin nouveau-né s’offre en jus de jouvence
Quand le babil fermente en refrains matinaux
Quand novembre est le mois chargé de connivence
Affrontons le réveil des bouchons libérés
Quand l’alcool est poème en déshabillé rouge
Quand le nectar se jette en torrents modérés
Quand le raisin se fige et que soudain tout bouge
Affrontons le public des gosiers affûtés
Quand le flot de la vigne est un sang de cépages
Quand la hotte est Garonne aux châteaux réputés
Quand l’auteur exigeant est au cœur de ses pages
Affrontons le concert du printemps rétabli
Quand le bouquet se vêt de fleurs sans épithète
Quand enfin mars repeint les couleurs de l’oubli
Le Fronton fait jaillir l’élixir du poète
Gaston Binvéria
L’Amour comme le vin…
L’Amour comme le vin a le goût du soleil,
Le goût du fruit sucré qui laisse sur la bouche
L’ivresse de l’instant aux sources du vermeil
Où l’art de volupté vous invite à sa couche.
Le vin comme l’amour pétille en mûrissant,
Exhalant un bouquet de subtiles fragrances
Jusqu’aux vignes du cœur, un brin étourdissant
En grappes d’élixir pour noces d’abondance.
Le vin comme l’amour, en parfums capiteux,
Se donne et se distille à la coupe de vie,
Liqueur née du divin, du germe silencieux
De la terre et du ciel qu’on boit jusqu’à la lie,
Jusqu’au vertige fou qui fleurit de saveurs
Les treilles de l’été en nectar de promesses,
Jusqu'aux moissons de pourpre égrenant les douceurs
Des sèves abreuvées au vent chaud des caresses.
L’Amour comme le vin se pare en vieillissant
Des couleurs irisées de l’arôme du temps
Buvez si m’en croyez, n’attendez à demain,
Vibrez, dansez, aimez et… rendez gloire au Vin !
Anne-Marie Vergnes
15.09.2001
Déclaration d’amour
(du vigneron à la vigne)
Toi mon amante, au rêve inassouvi de gloire
Et de fraternité rapprochant les humains,
Par tes pampres joyeux, tu chantes mon histoire
Entièrement vouée à suivre tes chemins.
« Il ne vit que pour toi » murmure chaque année
Qui passe sur ma voix de vigneron fourbu.
Oui, j’ai dompté ton corps de liane abandonnée,
Quand les feux de sarments frôlaient ton lit herbu.
Dans ton vin de soleil, je fais passer mon âme.
Soupirant au cœur nu, je suis jaloux du vent
Qui te prend par la main et souvent je le blâme
Ainsi que la fureur du ciel pourpre, au levant.
Sans relâche, sculpteur de tes ceps-silhouettes
Plongés dans une veille où s’enrhume l’hiver,
Je garde contre moi tes sèves violettes,
Je réchauffe ta vie égarée au grand air.
D’un savoir paysan, l’humble parole ombrage
Ton visage ébloui, doux comme du raisin.
Pour le goût de terroir de ton ventre-feuillage,
Je pourrais me damner ou pendre mon voisin.
Aux vendanges, tes jours, en quête de fortune,
Raviront Dionysos lors du banquet final.
Et la nuit peignera, sous les grappes de lune,
Tes cheveux emmêlés au vieil or automnal.
Marilène MECKLER
LE BIDEUX
Il gisait ivre-mort, couché dans le fossé ;
On riait sans le plaindre ; à cet âge féroce,
L'enfant accepte tout : il sourit de l'atroce,
Lorsque la peur survient l'on fut déjà blessé...
Avait-il un prénom ? Qui connaissait son âge ?
D'une voix gutturale, on l'entendait chanter ;
Dans son monde assombri, ne se laissant tenter
Que par la gnôle amie, un apaisant breuvage...
Chez lui, je le suivais, il n'était pas méchant ;
S'intoxiquait de vin : en cette vie, épave,
Recherchant à tâtons les tonneaux de sa cave,
Il ne me voyait pas, à sa façon, touchant...
Appelé « Le Bideux », il est mort dans la neige ;
Dans sa vieille maison fut-il un jour heureux ?
Cet homme exista-t-il ? Rêva-t-il d'être un preux ?
En les cieux, libre enfin, lui tendit-on un siège ?
Germaine Cartro
RONDEL
La faute à Bacchus
Je voulais pourtant bien lui plaire,
Mais Bacchus m'offrit son tonneau,
Connaissant mon rejet pour l'eau,
Bravant le risque vasculaire.
M'apparut ce trouble oculaire,
Changeant ma belle en dindonneau
Je voulais pourtant bien lui plaire,
Mais Bacchus m'offrit son tonneau,
Puis vint l'outrage culinaire,
J'étais entré dans le fourneau,
En la traitant de jambonneau,
De gros boudin... articulaire,
Je voulais pourtant bien lui plaire.
Georges Lafon .
Sonnet
Á l’ombre du tilleul
La récolte du foin, présume pour l’étable
Sa réserve d’hiver, sa générosité.
La fraise et l’abricot, gages d’exquisité,
Célèbrent l’abondance et le temps indomptable.
Venez mon doux ami, c’est l’heure où l’on s’attable.
À l’ombre du tilleul, laissons l’adversité.
Le vin frais nous attend, foin de morosité.
Trinquons au bleu du ciel, à l’instant délectable.
Juin, une fois encor, nous donne sa splendeur
Bien avant que Phébus n’apporte son ardeur.
L’oracle l’a prévu : le printemps se termine.
Goûtons comme il se doit, ce moment savoureux,
Qu’importe la saison quand le cœur s’illumine,
Il garde pour toujours les souvenirs heureux !
Yvonne NAVE
Le vin
Dans un verre rebondi,
Sa belle robe chatoyante
Peut devenir du rubis,
Un hymne à des amours naissantes.
Ses effluves parfumées,
Comme des vagues de senteurs,
Sollicitent gaiement le nez
Et présagent le bonheur.
Regardez une table de fête
Avec des convives joyeux,
Des envies de rire plein la tête,
C’est vivre un moment heureux.
L’imagination des œnologues
Le chante sur tous les tons.
Une palette de peintres en vogue
Suffit à peine à sa chanson.
Dans l’histoire tourmentée des hommes
Il accompagne leurs tribulations.
Depuis fort longtemps en somme,
Il est leur nectar de prédilection.
Yvonne Nave
LE VIN
Je serai consignée en triste pamphlétaire :
De la divine treille et ses effets trompeurs,
Je ne vois dans le vin que charme délétère,
D’une dramaturgie aux mortelles vapeurs.
Baudelaire, enivré, connait-il l’allégresse ?
Si cela peut paraître, hélas ! inopportun,
Pour moi ce fou breuvage apporte la détresse
Et donc, ce qui va suivre, en choquera plus d’un !
J’évoque la douleur des épouses battues
Quand l’amant délicat se transforme en hussard !
Leur vie est un chemin de traques éperdues :
L’alcool, Docteur Jekyll, fait l’ horrible soudard…
La femme, du fléau, sera-t-elle épargnée ?
Nourrice en plein brouillard, elle ignore les cris,
De nuit, comme de jour, tristement avinée,
Elle est sourde à l’appel venu des tout petits.
Fracassé, le futur hante le cimetière…
Peut-être, pire encor, est l’ immonde handicap ?
L’abomination est foule en la matière
Mais, de ce drame, un jour, va-t-on franchir le cap ?
Je ne chante donc pas le vin ni ses vertus.
Pour le poète fou, gai, dionysiaque
Mnémosyne nous dit qu’ il rend l’esprit confus
Grimant un agnelet en loup démoniaque.
Vous voudrez pardonner ce sinistre bémol,
Ivres, tant de griots ont chanté sa victoire !
Je l’associe au sang, venin dans le formol !
Il est fuite des jours mais…c’est une autre histoire…
*Muse de la mémoire
Mireille Turello-Vilbonnet
Escales de nuit
Au coin de la rue,
Les nuits du vieux bistrot se suivent,
Se ressemblent.
Une cigarette coincée entre ses doigts noueux
Affalé sur la banquette de moleskine verte
Il garde ses yeux rivés
Sur sa robe grenat,
Sa brillance, son éclat
Et son parfum de fruits sauvages.
Une pointe d'amertume...
Le ballon de rouge
A la saveur de la terre.
Nuits d'ivresse remplies d'alcool
A la recherche de plaisir.
Nuits noircies de suie
Au rendez-vous des solitudes
Accoudées au zinc.
Les verres se rencontrent, se cognent,
Les cœurs se réchauffent.
Les compagnons d'un soir
Jaillissent des entrailles
De la terre.
Martine Gava-Massias
LES MÉNADES
(Grèce archaïque)
Les ménades échevelées
Les campagnes viennent hanter ;
Par DIONYSOS ensorcelées
Elles sont là pour vous tenter...
Ces amoureuses insatiables,
On les entend venir de loin,
Car leurs clameurs épouvantables
Retentissent, ivres de vin...
Prenez garde, mâles aimables !
Pour vous n'existe aucun refus :
Une tentation effroyable
Pour les champions des invaincus...
Sachez pourtant qu'en fin d'année,
Le tout puissant matriarcat
Vous sacrifie à l'Empyrée
Un sort glorieux quand on y croit !
Oyez jeunes gens les ménades,
Oisiveté, joie et plaisir ;
Mêlez de ris leurs cavalcades,
Ou construisez votre avenir...
Germaine CARTRO
En la Grèce Archaïque : les Ménades choisissait le roi de l'année. Elles le sacrifiaient pour élire un nouveau roi en fin d'année, etc...Elles étaient consacrées à DIONYSOS le Dieu de la vigne, du vin et des plaisirs. Elles se livraient à des orgies et aucune sorte d'excès ne leur était interdit. Plus tard ces orgies furent à ROME nommées BACCHANALES en l'honneur de BACCHUS le même dieu sous son nom latin.
IVRESSES
- Versez, monsieur, dit la marquise:
L'éclat de l'ambre est moins troublant,
Moins douce la lueur exquise
De vos yeux frôlant mon cou blanc,
Versez - mais rien qu'un fil, un fil me grise!
- Ami, verse le vin vermeil,
Clame le chœur des joyeux drilles,
Verse le sang que le soleil
Infuse aux grains pour qu'ils pétillent,
Verse à flots ce nectar au feu pareil!
- Versons, mon amour, l'un pour l'autre
La chaude liqueur de l'oubli,
Versons, tant que le temps est nôtre,
Le vin rieur, le vin joli,
Que plaide en nos deux cœurs ce bon apôtre!
- Chopine, à moi ton chalumeau,
Brûle ce qui me reste d'âme,
Braille le soiffard des chromos,
À moi le gouffre, à moi la flamme
De ton enfer où s'abîment les maux!
- Versez tout doux, mes fils, mes filles,
Songe l'aïeul; mon corps est las;
Couleur de mûre ou de jonquille,
Grenache, muscat, chasselas,
Nul vin ne ravivera la guenille!
- De vin, de vers ou de vertu
Enivrez-vous, dit le poète,
Mais prenez garde au temps têtu:
S'il dort tant que brille la fête,
Il guette à l'heure où les chants se sont tus.
Marie-José Bertaux
SORÈZE 24 AOUT
Comme souvent, la rencontre poétique du 24 août à Sorèze a comporté son lot de jolies surprises. Ainsi l'un des lauréats de notre concours, Christian Charuel, de Nantes, 3ème mention dans la section "Recueil", de passage dans le Lot avec son épouse, est venu lire quelques extraits de "L'âme aux lieux". Le reste est à découvrir au fil des images:
Christian Charuel primé au concours 2014. | |
La fille et la petite-fille de Roselyne Morandi. | Martine Gava-Massias, adhérente récente. |
Son amie Monique lit des extraits des recueils d'Anne-Marie Vergnes, "D'onde et de chair" et "Frissons de vie". | Pierre Gabarra est venu en compagnie de sa mère, et a proposé des poèmes inédits. |
Le sculpteur Roland Gourdon fait partie des fidèles amis des "Dimanches en poésie". |
Christiane, nouvelle adepte, a lu Yvonne Naves, et déclaré: "C'était une première pour moi et j'ai été touchée autant par la richesse des lectures, dont certaines m'ont beaucoup émue, que par l'ambiance chaleureuse de l'atmosphère." |
Anne-Marie Vergnes et Roselyne Morandi (qui a proposé pour sa part des extraits de "À fleur de nuit à la suite du vent", Bleu nuit désir", et "Saisir un cœur", par la voix de Sèveryne sur une musique de Suduaya). | La dégustation finale... |
Photos (et renseignements!) de Roselyne Morandi.