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    Fallait-il qu’il plût à Sorèze,

    Le jour où, ramenant nos fraises,

    Nous comptions pouvoir - sans Thérèse !-

    Offrir à nos livres  - balèzes ! –

    Une table où prendre leurs aises,

    À l’ombre, non de noirs mélèzes,

    Mais de platanes pour cimaises,

    Dont une vigilante ascèse,

    D’élagages en  aphérèses,

    Contient la tendance à l’obèse.

    Nous aurions, assis sans mésaise,

    Attendu qu’un chaland se plaise

    À goûter rimes et diérèses,

    Et peut-être sorte son pèze

    Pour l’amour d’œuvres point niaises…

    Las ! près Revel comme en Corrèze,

    Les bois touffus - vert Véronèse ?-

    Attirent moins les cieux de braise

    Que le déluge qui apaise

    La soif des sèves et des glaises.

    Vint-il une étoile mauvaise,

    Hostile à nos rêves de chaises

    Dans une tiédeur antillaise ?

    Nous ne fûmes pourtant pas treize,

    Nombre fatal, dit la fadaise.

    Mais du mail une pluie anglaise

    Nous chassa : il fallut qu’on taise

    Pour cette fois les Paimpolaises,

    Et qu’on mette entre parenthèses

    L’espoir de briller à Sorèze !

    Nous reviendrons, ne vous déplaise,

    Vous faire entendre l’exégèse

    Des vers nombreux qu’en sa fournaise

    Notre cerveau forge et soupèse

    Pour enchanter vos portugaises !

      

     

               Marie-José BERTAUX  4 juin 2012

     

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    PLUIE      

     

    Qu’enfin vienne l’averse, et le monde sourit !

     

    Sous les rayons têtus de matins sans nuage,

    Devant le champ désert, l’œil s’effare et s’aigrit

    À scruter un ciel pur où jamais ne s’inscrit

    Du déluge espéré le vaporeux présage.

    La terre meurt de soif, poussière ou dur damage,

    La graine s’y perdra, le germe y dépérit.

     

    Mais enfin vient l’averse, et le monde sourit !

     

    Dans la molle moiteur le grain prenant courage,

    La semence a gonflé, la pousse s’aguerrit,

    La tige mince perce en valeureux conscrit

    La motte qui succombe aux assauts de l’orage ;

    Bourgeons, dépliez-vous, déplisse-toi, feuillage !

    Qu’en vos neigeuses fleurs, cerisiers, notre esprit

    Rêve les fruits de miel qu’empourpre et que nourrit

    Du soleil avec l’eau le juste mariage !

      

      

     

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                                 DÉSILLUSION

      

    Les jours me durent loin de toi,

    Le ciel s’éteint, l’ombre s’allonge,

    Les nuits désespèrent qu’un songe

    Dans ton retour me rende foi.

     

    L’absence à s’éterniser ronge

    Les plus beaux atours des serments,

    Sous leurs ors pointant le mensonge.

     

    On rêve mille enchantements

    Quand l’un de l’autre on s’émerveille :

    Extase à nulle autre pareille

    Que les fantasmes des amants !

     

    - Faut-il donc que je m’en réveille ?

      

     

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     VENT D'AUTAN

     

    - Vent d'autan, vent du diable! a rouspété Grand-mère,

    Mais l'enfant plonge dans les vagues du vent fou,

                    L'enfant se sent l'âme légère:

    - Enroule-toi, grand vent, sur mon corps, à mon cou,

    Dans tes ondes de chair brasse-moi tout entière,

                                Serre, serre, serre!

     

    Grand-mère a dit: - Prends ton bonnet, mets ton blouson!

    Mais l'enfant, les bras nus, s'envole à contre-vague,

                    Ses mains étoilent l'horizon:

    Grand vent qu'elle aime, à ses dix doigts passe dix bagues!

    Vent tiède et fort, si doux, si vif que tes frissons,

                                Brouillent les saisons!

     

    - Vent d'enfer, dit Grand-mère, emmêleur de cervelle!

    Mais l'enfant court et danse au cœur des tourbillons,

                    Sa robe en fleur valse autour d'elle:

    - Entraîne-moi, grand vent, soulève-moi, fuyons

    Plus vite que la feuille et plus loin que ses ailes

                                N'emportent l'oiselle!

     

    Oui, se perdre dans l'air comme fleuve ou rivière

    Infus dans l'océan, comme à l'azur du ciel

                    Se fond le rayon de lumière!

    Insuffle-nous, grand vent, ton être insubstantiel,

    Que tombe de nos corps le poids qui les atterre!

                                - Rentrons! dit Grand-mère.

      

                                      Marie-José BERTAUX

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